Dix ans l'année prochaine que nous vivons
sur l'île où se dispute le divorce le plus complexe du 21ème siècle - toujours
en suspens 3 ans et demi après le référendum.
Si les doutes sur l'avenir
persistent, il nous a semblé évident d’officialiser pour nos enfants leur
double culture.
Ils ont vécu ici une enfance où
on mange à 17h des Toad in a Hole, et se régalent de street food avec toutes
les cuisines du Monde, fans de naans, makis ou tortillas. Ils ont mangé leurs Hula Hoops sur le bout des doigts (chips en forme
d'anneaux) comme Amélie Poulain, et sont fins connoisseurs de toutes sortes de saveurs
de chips.
Ils chantaient les nursery
rhymes en VO, Humpty Dumpty sans accent; ils n'ont pas joué à
123 soleil (Grandma's footsteps) ni à la balle au prisonnier (Dodgeball);
ils ne font pas Plouf Plouf, mais font référence à un chien "Doggy did a
poo, who stepped in it, that was you"; ils ont appris à nager le crawl avant
la brasse et savent jouer à des jeux de balles aux règles obscures comme
le cricket, Lacrosse ou au nettball; ils
ont circulé en Micro Scooter et en vélo sans pédales, montent
SUR le bus (les fameux double deckers), savent parler de toutes
les religions et ne s'étonnent pas de tissus portés autour de la tête, d'un
visage ou sur le corps entier.
Ils traversent sans regarder
les flèches au sol et n'ont pas de problème à prononcer les tongue
twisters ni les "th". Ils ont grandi dans une ville
et un pays qui célébraient les différences, les cultures, tous les sports, où
les héros populaires participent aussi bien aux jeux olympiques ou
paralympiques.
Ils ont aimé l'école qui les a
accueillie avec tant de bienveillance, autant que nous, parents, un verre à la main
lors des réunions ou événements de levées de fond, présents à toutes les "assemblies",
pour entendre un mot, une phrase ou applaudir une chorégraphie sur "Moves
like Jagger", sans rien comprendre aux dialogues trop vite déclamés,
pourtant émus devant les scènes de nativité où les petites souris de l'étable de Bethléem illustrent We Wish you A Merry Christmas en langage
des signes.
Ils appartiennent à une communauté d'école (s), équipes sportives
ou clubs, dont ils sont fiers d'affirmer leur appartenance, se réjouissent des
points collectifs rapportés quotidiennement pour leur "maison". Ils
ont gagné des kilos de médailles pour toutes sortes de compétences, ils
ont été extremly helpful, hard worker, a real delight to teach, et même
reconnus pour leur bon coup de fourchette notre dinner winner ou pour leur écriture impeccable, et bien-sûr proclamés annuellement star of the week. Ils ont
fabriqué des quantités de maquettes en emballage
recyclés au coin Junk Modeling, ils n'hésitent pas à se
déguiser en romains ou en ramoneur victorien jusqu'à 11 ans - presqu'à
l'âge où ils ne croient plus au Père Noel. Ils apportent à l'école des
conserves de nourriture pour Harvest Festival, portent des pois
pour Children in Need, et participent à Jeans for Genes Day.
Ils comptent en anglais et posent les divisions à leur manière les très complexes long
divisons, ne connaissent pas les numéros des départements français ni les
rivières, fleuves ou leurs affluents !
La question des genres n'en
n'est pas une, ils ont vu toutes sortes de citoyens en assemblies présenter
aux élèves leur domaine d’expertises, auteurs, illustrateurs, associations, sportifs de haut niveau, où
l'accès pour les filles est possible; ils apprennent très tôt que le foot se
décline au féminin comme les professions scientifiques, le casque jaune de
chantier est fièrement porté et même en rose, dans une ville où les femmes font
du vélo avec une barre horizontale !
Dans quel pays choisiront ils
de vivre, d'étudier ou de s'installer, nous n'avons pas les réponses. Une petite idée peut-être...Le nuage
de lait dans le thé, leur goût pour les chips au vinaigre nous laissent parfois
décontenancés comme ce moment de la cérémonie de "Citizenship"où
ils ont chanté God Save the Queen, nous laissant marmonner quelques
paroles et finir en playback.